humiliation scolaire

22 décembre 2006


article: Pierre Merle
source: le Monde
septembre 2006


Un sentiment subjectif

C’est donc l’accès au savoir qui se trouve obstrué par une mauvaise estime de soi. "Avant de chercher les remèdes, il importe de comprendre les maux", explique le sociologue Pierre Merle, professeur à l’IUFM de Bretagne.

Les maux se traduisent tout d’abord en chiffres. Selon une enquête qu’il mena en 2001, 20 % des collégiens interrogés déclaraient avoir connu des situations de "rabaissement scolaire"
De la dépréciation classique d’une copie "c’est minable, médiocre, nul" au dénigrement qui s’adresse à la personne même de l’élève "pétasses, coincés, bons à rien", l’humiliation scolaire perdure chez "un élève sur cinq, cela n’est pas rien", rappelle le sociologue, selon lequel les dégâts peuvent être considérables.


Ces brimades psychiques véhiculent souvent une "représentation innéïste" de l’élève : sa nullité ne proviendrait pas d’un défaut d’apprentissage, mais de son inaptitude intrinsèque et innée au savoir. Pierre Merle a entendu dans un témoignage : "La copie la plus nulle, c’est pour le gros lard !", phrase terrible et qui ne s’orienterait pas vers les caractéristiques physiques si la copie était bonne", s’insurge Pierre Merle.

Derrière ces rares mais problématiques cas d’humiliation, il y a le commun des situations de rabaissement involontaire. "Certains élèves peuvent très mal prendre un "ce n’est pas digne de toi" adressé à un enfant qui pourrait faire bien mieux", assure le sociologue. Difficile d’évaluer la souffrance narcissique des élèves, tant le sentiment d’humiliation est subjectif, tant il ne faut pas confondre humiliation et arrachement aux habitudes familiales et familières, des parents aux groupes de pairs.

Impossible de mettre la majorité des professeurs sur le banc des accusés, car ils sont également victimes d’un système et d’une relation pédagogique qui met en péril leur propre estime d’eux-mêmes.


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